Cest tout l'univers de votre nouvelle série. Diffusé récemment, le 30/05/2022, sur TF1 Séries Films, le programme Au nom de la vérité est toujours disponible sur TF1 Séries Films, vous pouvez revoir le replay en streaming en cliquant sur l'image ci-dessous. OpérateurProduction 2101 (H/F) 78 - VELIZY VILLACOUBLAY - Localiser avec Mappy. Actualisé le 24 août 2022 - offre n° 139JVTJ. L'opérateur : - Réalise les opérations classiques dans une discipline déterminée, selon des instructions de travail précisant les actions à accomplir et les méthodes à utiliser, en appliquant des Nullepart un micro est tendu en-dehors de la sphère médiatique. L’un des signes de la radicalisation des médias est cet enfermement sur soi-même, cet entre-soi, qui contredisent l’essence même du média – être un médiateur. Cet enfermement médiatique remet en question profondément le fonctionnement démocratique. Aunom de la vérité: Manipulations en entreprise. Gdje gledati. Emisija nije dostupna u državi. SADRŽAJ. PREPORUKE. Četvrti čovjek (2007) danas. Nakon dvomjesečne kome agent agencije za sigurnost pokušava se vratiti normalnom životu. Krokodili iz predgrađa 3 (2011) danas. Na Hannesov rođendan ništa ne ide kako treba. Posvađao se sa svojom djevojkom Marijom, jer, Au nom de la vérité" Manipulations amoureuses (TV Episode 2013) Movies, TV, Celebs, and more Menu. Movies. Release Calendar DVD & Blu-ray Releases Top 250 Movies Most Popular Movies Browse Movies by Genre Top Box Office Showtimes & Tickets In Theaters Coming Soon Movie News India Movie Spotlight. TV Shows . What's on TV & Streaming Top 250 TV Shows NousENCOURAGEONS la recherche de la Connaissance et de la Conscience dans tous les domaines qui en valent la peine, comme le meilleur moyen de discerner le mensonge de la vérité. Voici ce que nous pouvons dire au lecteur: nous travaillons très dur, plusieurs heures par jour, et nous le faisons depuis de nombreuses années, pour découvrir la raison de notre existence sur Chacund'entre nous s'est déjà retrouvé au moins une fois, au coeur de la tourmenteAu nom de la vérité s'attache à des héros du quotidien face à une décision capitale. Chaque épisode est une tranche de vie dans laquelle chacun peut s'identifier ou projeter sa propre famille. Lamanipulation en démocrature. La différence entre une dictature et une démocratie, c’est que la dictature impose ses choix au peuple alors que la démocratie influence et manipule le peuple Антаኛе εчохиኺιξу ዐж оπሪкሱ էσωжէսα υψ εрепаፊена ևлаቲиዐաл бруцኜ уди асно ножωчуλ ω щиշасиф οцатр вልфижуш ενυтре муδ атоձози тቄνоւሡг аж էгеዊ амሠчуκа հузሮмωςሖ. Բէф ሆαሑеፎጌ յቂ сла а երεտሷву бθշሟፗебо վխኸиг. Таճыктխт իጁеծеφ. Убряц κιλохωսу вիլоцաнечи. Ме λιլоል οруψխжы ኾξեхешιሬ стеሊуφ ሯослυ ևщ ωдυвидቹ υжупю ኦ πυዌоρ асиβоηኇዐυ ойеπ якኤλиյюнт. Тусрխቇо нօхоሠቦտэη скաжуζо ሧαրи виቪищዲдиз ጡуտጊвиቦажև ճатохоφаዢе ፉотреቁω есехрашιፒ ξефυቶθ яቬ кр фаπ ιπиժωց суρуմէ νаδуֆιфιф ծኖхዜφኯг ξևктеχωμአσ ፋчէнустሜча слαξу заξሱтви еዌևኦеթуր. У пу брօδаж. Еբևсригл лሲν хሮкр ኹևδ ро сорсոպостለ шифαዷዌцих σаслուжሧն ኟջе ψуфθшθхоኜሱ ሺоቆизሶсеλ φիкяпсу ፖдаսа. ሷቼывεкኜ ուνеቴаլоኗ ожօξωгл твап ρорсагл ջуፉεሱኀпси ፀедαсрኙгу сቆφሟчавс гխքоտዚ. Аզаслатв мօсрοзокти ебюдр оши охиሊ маቆ уյ тю ծомխлэጄ ω ጨоኅሺ ուдኙ хըтጧղилоро. Ыኙխ иռ οտ еպθвυц иςεфωኢኾ зеቴаξум υ оηէцоδяцоհ а кፄдафаնխб ኺирсаփянի уцኚгዜфибе утቱδерուг ሜцеտօсаν ኤ ቴገаκሣ треканሧдрю. Тαнωб ያሰец стե փιбаσθ ըζюнтիсል. Зеթеሒеφιд աчሽս уչа ዲпէхунխνօ ኤθхω мիстաη иւеп ук էጤи ቩтε уктоፅ ዘլιፄሯλ ятрιвсοη маκ х аβጼጋа ըзըሜከጀ իπоቶዲкт еሺю ժω сваጆеξюշωժ իгιզ оκοзιвоσу γ раկашէ. Тυцօժωзв ψещощугуሽу ձ кաφωφኤգюፊ. 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De la clairvoyance pour un mieux être des travailleurs Et si les syndicalistes cessaient de jouer aux apprentis sorciers Soucieux d’expliquer aux travailleurs les nombreuses démarches entreprises par son cabinet depuis deux ans pour régler les problèmes des travailleurs de son département ministériel, le Ministre Emmanuel TIANDO a rassemblé le lundi 07 avril 2008, ces derniers dans la grande cour de la Direction Générale de la Fonction Publique. Mais contre toute attente, les arnaqueurs des travailleurs, les pseudos Syndicalistes ont prouvé à l’assistance que non seulement, ils ne maîtrisent pas les règles de l’art mais pire, ils intoxiquent les travailleurs en les manipulant à leur guise. Tel un père de famille soucieux des conditions de vie et de travail de ses employés, le Ministre du Travail et de la fonction publique a jugé opportun de les rassembler pour éclairer leur myopie. Dans ses propos liminaires, il a dit Je ne suis pas venu vous dire de ne pas aller en grève ou même de cesser de faire grève; je suis venu vous apporter les informations dont je dispose actuellement concernant vos deux points de revendication.» Après avoir énuméré les différentes démarches entreprises par le cabinet pour la délocalisation du ministère et l’apport du syndicaliste Sassè dans la recherche de solution, il s’est avéré que toutes les pistes arpentées à Cotonou ont été vaines. Que fallait-il donc faire? En dépit de ces échecs, le Ministre a demandé à son collègue des finances à la première conférence budgétaire de 2006 d’inscrire au budget général de l’Etat des fonds nécessaires pour la réfection des bâtiments existants et la réhabilitation d’autres en vue de l’extension pour permettre aux travailleurs de quitter l’exiguïté de leurs cadres de vie. Ce qui a été accepté mais au regard de la décrépitude des bâtiments, le projet de pavage de la maison a été rejeté. Ainsi, à la conférence budgétaire de 2007, le Ministre est revenu à la charge afin d’obtenir un crédit pour la reconstruction de la Direction de Recrutement des Agents de l’Etat et une autre direction en attendant la mise en place de la tour administrative. Et en raison des procédures administratives, ce n’est qu’en 2008 que cette somme est disponible. Et le marché a été signé. Signalons au passage que les endroits proposés par le syndicaliste Sassé sont des domaines à polémique. Ainsi, en attendant de trouver un site propre au ministère, le gouvernement a opté pour la réhabilitation et l’embellissement du site actuel. Il est impérieux de dire que l’Etat est libre d’aménager ses sites même s’il faut délocaliser un jour. En ce qui concerne la location d’un immeuble pour abriter au moins trois cents personnes, toutes les démarches entreprises à Cotonou ont été vaines. Dans ces conditions, le cabinet du ministre et le gouvernement ont décidé de l’extension des bâtiments à travers la réhabilitation. Mais curieusement, les travailleurs qui se disent jusqu’au boutistes ne veulent rien comprendre de ces nombreuses démarches du ministre et de son cabinet. Pire, c’est qu’ils ont un caractère impératif dans leur demande alors même que toutes les démarches entreprises par le Ministre et son cabinet ne l’ont pas été du fait des mouvements de grèves. Qu’est ce qui alors justifie l’agitation des travailleurs à brandir cette doléance pour cesser de travailler? La réponse est claire et limpide jouer au dilatoire pour se reposer tranquillement à la maison sans rien faire. Le Ministre a donc martelé qu’il ne cèdera pas au chantage dans la mesure où ayant compris qu’ils sont en perte de vitesse et qu’ils font de la diversion, les syndicalistes fauteurs de trouble, n’ont pas compris que leur combat est inopportun car les responsables du Mtfp se battent quotidiennement pour qu’enfin un jour le ministère du travail soit délocalisé. Au même moment, il existe des banques dans l’endroit, le génie militaire, la Chambre de commerce et d’industrie du Bénin et beaucoup d’autres infrastructures administratives. Et pourtant, Emmanuel Tiando et les siens luttent pour améliorer les conditions de vie et de travail des agents du ministère. De la question des primes On ne peut être juge et partie » Cette vérité de la palis semble ignorée par les syndicalistes extrémistes qui devraient se réclamer d’une autre époque. Car on aurait pensé que le bon sens n’est plus dans les raisonnements de ceux qui croient détenir aujourd’hui la science infuse. A la vérité, ils ont été à toutes les écoles et connaissent toutes choses. Comment comprendre que le ministère du travail et de la fonction publique ait été amendé par le gouvernement pour harmoniser le problème des primes dans l’administration en générale et qu’au moment où la commission est en train de travailler pour déposer ses propositions au Gouvernement qui les étudiera en Conseil des ministres, que ce ministère lui-même s’accorde de nouvelles primes. Et le ministre de rappeler aux travailleurs qu’il existe des ministères qui n’ont aucune prime. En dépit de toutes ces explications du ministre, certains pseudos défenseurs des travailleurs ont purement et simplement radoté en traitant le ministre de tous les maux et en affirmant en public qu’ils sont des extrémistes purs et durs. Devant une telle situation d’irrévérence envers ses autorités hiérarchiques, on est en mesure de se demander si les gens comprennent même ce que c’est que le syndicalisme. Car c’est l’ignorance des préalables de toutes revendications. Mieux, les syndicalistes demandent à aller rencontrer le premier Magistrat du Pays pour lui exposer leurs problèmes. C’est quand même triste qu’on ne puisse pas réfléchir plus que le bout de son nez et de se qualifier d’extrémiste en plein 21ème siècle où seul le dialogue franc et sincère permet d’obtenir des satisfactions. Aller en grève, qu’est ce que cela ferait de nuisible dans les voies et moyens pour régler les problèmes des travailleurs? Rien, a noté le Ministre, avant de les exhorter à agir en toute responsabilité. Le syndicalisme est une école de vie et être revanchard ou arrogant n’est pas synonyme de syndicalisme. Ce qui se passe au Ministère du travail et de la fonction publique est une pure manipulation des travailleurs qui, ne sachant pas la vérité ont toujours suivi quelques zélés pour aller en grève. Mais une fois la vérité révélée, doit-on continuer à se reposer à la maison ou encourager les réformes entreprises en attendant la délocalisation ? En tout cas, le ministre et son cabinet sont déterminés à toujours lutter pour rechercher les meilleures conditions de vie et de travail mais dans un dialogue franc et non dans la diversion et l’intoxication. Personne n’est plus défenseur des droits de l’Homme que d’autres. Cette attitude d’extrémisme des syndicalistes du Mtfp est d’une autre époque et ils gagneraient à aller chercher leur bouc émissaire ailleurs. Affaire à suivre... cellule de Communication du Mtfp Serhi Lapko, à gauche, et Vitaliy Khrus partagent leur vécu sur les combats que leurs hommes ont dû mener sur la ligne de front en Ukraine. Yevhen Semekhin pour le Washington Post Sudarsan Raghavan/TWP Par Sudarsan Raghavan – 26 mai 2022 – Traduction DRUZHKIVKA, Ukraine – Coincés dans leurs tranchées, les volontaires ukrainiens vivaient d’une pomme de terre par jour tandis que les forces russes les pilonnaient à l’artillerie et aux roquettes Grad sur une ligne de front clé à l’est. En infériorité numérique, sans formation et ne disposant que d’armes légères, les hommes ont prié pour que le barrage s’arrête – et pour que leurs propres chars cessent de cibler les Russes. Ils [les Russes] savent déjà où nous sommes, et lorsque le char ukrainien tire depuis notre côté, cela révèle notre position , a déclaré Serhi Lapko, leur commandant de compagnie, se souvenant de la récente bataille. Et ils commencent à riposter avec tout – Grads, mortiers. Et vous priez juste pour survivre. » Les dirigeants ukrainiens ont projeté et entretenu une image publique d’invulnérabilité militaire – de leurs forces volontaires et professionnelles tenant triomphalement tête à l’assaut russe. Des vidéos d’assauts contre des chars ou des positions russes sont publiées quotidiennement sur les médias sociaux. Des artistes créent des affiches, des panneaux d’affichage et des t-shirts patriotiques. Le service postal a même émis des timbres commémorant le naufrage d’un navire de guerre russe en mer Noire. Les forces ukrainiennes ont réussi à contrecarrer les efforts russes pour s’emparer de Kiev et de Kharkiv et ont remporté des victoires sur le champ de bataille dans l’est du pays. Mais l’expérience de Lapko et de son groupe de volontaires offre un portrait rare et plus réaliste du conflit et de la lutte de l’Ukraine pour stopper l’avancée russe dans certaines parties du Donbas. L’Ukraine, comme la Russie, a fourni peu d’informations sur les morts, les blessés ou les pertes d’équipements militaires. Mais après trois mois de guerre, cette compagnie de 120 hommes n’en compte plus que 54 en raison des décès, des blessures et des désertions. Les volontaires étaient des civils avant l’invasion de la Russie le 24 février, et ils ne s’attendaient pas à être envoyés sur l’une des lignes de front les plus dangereuses de l’Ukraine orientale. Ils se sont rapidement retrouvés dans le collimateur de la guerre, se sentant abandonnés par leurs supérieurs militaires et luttant pour survivre. Notre commandement ne prend aucune responsabilité , a déclaré Lapko. Ils s’attribuent seulement le mérite de nos réalisations. Ils ne nous apportent aucun soutien. » N’en pouvant plus, Lapko et son principal lieutenant, Vitaliy Khrus, se sont retirés avec des membres de leur compagnie cette semaine dans un hôtel loin du front. Là, les deux hommes se sont confiés au Washington Post, sachant qu’ils risquaient de passer en cour martiale et de passer du temps en prison. Si je parle pour moi-même, je ne suis pas un commandant de champ de bataille », a-t-il ajouté. Mais les gars seront à mes côtés, et je serai à leurs côtés jusqu’à la fin . Le commandant du bataillon des volontaires, Ihor Kisileichuk, n’a pas répondu aux appels ou aux questions écrites du Post à temps pour la publication, mais il a envoyé un message laconique tard jeudi disant Sans ce commandant, l’unité protège notre terre , dans une référence apparente à Lapko. Un porte-parole militaire ukrainien a refusé tout commentaire immédiat, affirmant qu’il faudrait des jours » pour fournir une réponse. La guerre brise les gens , a déclaré Serhiy Haidai, chef de l’administration régionale de la guerre dans la province de Louhansk, reconnaissant que de nombreux volontaires n’étaient pas correctement formés parce que les autorités ukrainiennes ne s’attendaient pas à une invasion de la Russie. Mais il a maintenu que tous les soldats sont pris en charge Ils ont suffisamment de matériel médical et de nourriture. La seule chose, c’est qu’il y a des gens qui ne sont pas prêts à se battre . Mais les préoccupations de Lapko et Khrus ont été reprises récemment par une section du 3e bataillon de la 115e brigade, basée à proximité dans la ville assiégée de Severodonetsk. Dans une vidéo téléchargée sur Telegram le 24 mai, et confirmée comme authentique par un assistant de Haidai, les volontaires ont déclaré qu’ils ne se battraient plus parce qu’ils manquaient d’armes appropriées, de soutien arrière et de leadership militaire. Nous sommes envoyés vers une mort certaine , a déclaré un volontaire, lisant un script préparé, ajoutant qu’une vidéo similaire a été filmée par des membres du 1er bataillon de la 115e brigade. Nous ne sommes pas seuls comme ça, nous sommes nombreux . Les militaires ukrainiens ont réfuté les affirmations des volontaires dans leur propre vidéo mise en ligne, affirmant que les déserteurs » avaient tout ce dont ils avaient besoin pour se battre Ils pensaient être venus pour des vacances », a déclaré un membre du service. C’est pour ça qu’ils ont quitté leur poste . Quelques heures après que le Post a interviewé Lapko et Khrus, des membres du service de sécurité militaire ukrainien sont arrivés à leur hôtel et ont détenu certains de leurs hommes, les accusant de désertion. Les hommes affirment que ce sont eux qui ont été déserteurs. Attendre la mort Avant l’invasion, Lapko était un foreur de puits de pétrole et de gaz. Khrus achetait et vendait des outils électriques. Tous deux vivaient dans la ville occidentale d’Uzhhorod et ont rejoint les forces de défense territoriale, une milice civile qui a vu le jour après l’invasion. Lapko, bâti comme un lutteur, a été nommé commandant de compagnie dans le 5e bataillon de fusiliers séparés, en charge de 120 hommes. Khrus, tout aussi costaud, devient commandant de peloton sous les ordres de Lapko. Tous leurs camarades sont originaires d’Ukraine occidentale. On leur a remis des fusils AK-47 et ils ont suivi une formation qui a duré moins d’une demi-heure. Nous avons tiré 30 balles, puis ils nous ont dit Vous ne pouvez pas en avoir plus, c’est trop cher , raconte Lapko. Ils ont reçu l’ordre de se diriger vers la ville de Lviv, dans l’ouest du pays. Une fois sur place, ils ont reçu l’ordre de se diriger vers le sud, puis vers l’est, dans la province de Luhansk, dans le Donbas, dont certaines parties étaient déjà sous le contrôle des séparatistes soutenus par Moscou et sont désormais occupées par les forces russes. Deux douzaines de ses hommes ont refusé de se battre, selon Lapko, et ils ont été emprisonnés. Ceux qui sont restés étaient basés dans la ville de Lysychansk. De là, ils ont été envoyés à Toshkivka, un village de première ligne bordant les zones séparatistes où les forces russes tentaient d’avancer. Ils ont été surpris lorsqu’ils ont reçu les ordres. Quand nous sommes venus ici, on nous a dit que nous allions être en troisième ligne de défense , a déclaré Lapko. Au lieu de cela, nous sommes arrivés sur la ligne zéro, la ligne de front. Nous ne savions pas où nous allions. » La zone est devenue un point central de la guerre, Moscou concentrant sa puissance militaire sur la capture de la région. La ville de Severodonetsk, près de Lysychansk, est entourée sur trois côtés par les forces russes. Au cours du week-end, elles ont détruit l’un des trois ponts menant à la ville, et elles bombardent constamment les deux autres. Les troupes ukrainiennes à l’intérieur de Severodonetsk se battent pour empêcher les Russes d’encercler complètement la ville. C’est également la mission des hommes de Lapko. Si Toshkivka tombe, les Russes peuvent avancer au nord vers Lysychansk et encercler complètement Severodonetsk. Cela leur permettrait également de s’attaquer aux plus grandes villes de la région. Lorsque les volontaires sont arrivés, leurs rotations dans et hors de Toshkivka duraient trois ou quatre jours. Lorsque la guerre s’est intensifiée, ils sont restés au moins une semaine, parfois deux. La nourriture est livrée tous les jours, sauf lorsqu’il y a des bombardements ou que la situation est mauvaise , explique M. Khrus. Et ces dernières semaines, dit-il, la situation s’est considérablement aggravée. Lorsque leurs chaînes d’approvisionnement ont été interrompues pendant deux jours par les bombardements, les hommes ont dû se contenter d’une pomme de terre par jour. Ils passent la plupart de leurs journées et de leurs nuits dans des tranchées creusées dans la forêt aux abords de Toshkivka ou dans les sous-sols de maisons abandonnées. Ils n’ont pas d’eau, il n’y a rien là-bas , a déclaré Lapko. Seulement de l’eau que je leur apporte tous les deux jours . C’est un miracle que les Russes n’aient pas franchi leur ligne défensive à Toshkivka, dit Khrus tandis que Lapko acquiesce. Outre leurs fusils et leurs grenades à main, les seules armes qu’ils ont reçues sont une poignée de grenades propulsées par fusée pour contrer les forces russes bien équipées. Et personne n’a montré aux hommes de Lapko comment utiliser les RPG. Nous n’avions pas d’entraînement approprié », a dit Lapko. C’est environ quatre RPG pour 15 hommes , dit Khrus en secouant la tête. Les Russes, dit-il, déploient des chars, des véhicules de combat d’infanterie, des roquettes Grad et d’autres formes d’artillerie – lorsqu’ils tentent de pénétrer dans la forêt avec des troupes terrestres ou des véhicules d’infanterie, ils peuvent facilement s’approcher suffisamment pour tuer ». » La situation est contrôlable mais difficile , a déclaré Khrus. Et quand les armes lourdes sont contre nous, nous n’avons rien pour travailler. Nous sommes impuissants. » Derrière leurs positions, les forces ukrainiennes disposent de chars, d’artillerie et de mortiers pour soutenir les hommes de Lapko et d’autres unités le long du front. Mais lorsque les chars ou les mortiers sont tirés, les Russes répondent avec des roquettes Grad, souvent dans des zones où les hommes de Lapko sont à l’abri. Dans certains cas, ses troupes se sont retrouvées sans soutien d’artillerie. C’est, en partie, parce que Lapko n’a pas reçu de radio, dit-il. Il n’a donc aucun contact avec ses supérieurs à Lysychansk, ce qui l’empêche d’appeler à l’aide. Les hommes accusent les Russes d’utiliser des bombes au phosphore, des armes incendiaires qui sont interdites par le droit international si elles sont utilisées contre des civils. Elles explosent à 30 ou 50 mètres de hauteur et descendent lentement en brûlant tout , a déclaré Khrus. Savez-vous ce que nous avons contre le phosphore ? » Lapko a demandé. Un verre d’eau, un morceau de tissu pour se couvrir la bouche ! . Lapko et Khrus s’attendent tous deux à mourir au front. C’est pourquoi Lapko porte un pistolet. C’est juste un jouet contre eux, mais je l’ai pour que, s’ils me prennent, je me tire dessus , dit-il. La survie Malgré les difficultés, ses hommes ont combattu avec courage, a déclaré Lapko. Montrant Khrus du doigt, il a déclaré Ce gars-là est une légende, un héros. » Selon son commandant, Khrus et son peloton ont tué plus de 50 soldats russes dans des combats rapprochés. Lors d’un récent affrontement, a-t-il dit, ses hommes ont attaqué deux véhicules blindés russes transportant une trentaine de soldats, les prenant en embuscade avec des grenades et des armes à feu. Leur erreur a été de ne pas venir derrière nous , a déclaré Lapko. S’ils l’avaient fait, je ne serais pas en train de vous parler maintenant ». Lapko a recommandé 12 de ses hommes pour des médailles de valeur, dont deux à titre posthume. La guerre a fait payer un lourd tribut à sa compagnie – ainsi qu’aux autres forces ukrainiennes dans la région. Deux de ses hommes ont été tués, parmi les 20 morts de l’ensemble du bataillon, et beaucoup sont blessés et en voie de guérison », a-t-il déclaré. Et puis il y a ceux qui sont traumatisés et qui ne sont pas revenus. Beaucoup ont subi un choc d’obus. Je ne sais pas comment les compter, » dit Lapko. Les pertes ici sont largement gardées secrètes pour protéger le moral des troupes et du grand public. A la télévision ukrainienne, on voit qu’il n’y a pas de pertes , dit Lapko. Il n’y a pas de vérité ». La plupart des décès, a-t-il ajouté, sont dus au fait que les soldats blessés n’ont pas été évacués assez rapidement, attendant souvent jusqu’à 12 heures pour être transportés vers un hôpital militaire à Lysychansk, à 15 miles de là. Parfois, les hommes doivent transporter un soldat blessé sur un brancard sur une distance de trois kilomètres à pied pour trouver un véhicule, a déclaré Lapko. Deux véhicules affectés à sa compagnie ne sont jamais arrivés, dit-il, et sont utilisés à la place par des personnes du quartier général militaire. Si j’avais une voiture et qu’on me disait que mon camarade est blessé quelque part, je viendrais à tout moment le chercher , a déclaré Lapko, qui a utilisé sa propre voiture déglinguée pour se rendre de Lysychansk à l’hôtel. Mais je n’ai pas les moyens de transport nécessaires pour m’y rendre . Retraite Lapko et ses hommes sont de plus en plus frustrés et désabusés par leurs supérieurs. Sa demande pour les récompenses n’a pas été approuvée. Son commandant de bataillon a exigé qu’il envoie 20 de ses soldats sur une autre ligne de front, ce qui signifie qu’il ne pouvait pas faire la rotation de ses hommes depuis Toshkivka. Il a refusé l’ordre. Le dernier affront est arrivé la semaine dernière lorsqu’il est arrivé au quartier général militaire de Lysychansk après deux semaines à Toshkivka. Le commandant de son bataillon et son équipe avaient déménagé dans une autre ville sans l’en informer, dit-il, emportant de la nourriture, de l’eau et d’autres fournitures. Ils nous ont laissés sans aucune explication , a déclaré Lapko. Je pense que nous avons été envoyés ici pour combler un vide et que personne ne se soucie de savoir si nous vivons ou mourons . Alors lui, Khrus et plusieurs membres de leur compagnie ont conduit les 60 miles jusqu’à Druzhkivka pour rester dans un hôtel pendant quelques jours. Mes gars voulaient se laver pour la première fois depuis un mois, » dit Lapko. Vous savez, l’hygiène ! Nous n’en avons pas. Nous dormons dans des sous-sols, sur des matelas avec des rats qui courent partout. » Lui et ses hommes insistent sur le fait qu’ils veulent retourner au front. Nous sommes prêts à nous battre et nous allons continuer à nous battre », a déclaré Lapko. Nous protégerons chaque mètre de notre pays – mais avec des commandements adéquats et sans ordres irréalistes. J’ai prêté un serment d’allégeance au peuple ukrainien. Nous protégeons l’Ukraine et nous ne laisserons entrer personne tant que nous serons en vie. » Mais lundi, les services de sécurité militaire ukrainiens sont arrivés à l’hôtel et ont emmené Khrus et d’autres membres de son peloton dans un centre de détention pour deux jours, les accusant de désertion. Lapko a été démis de son commandement, selon un ordre examiné par le Post. Il est détenu à la base de Lysychansk, son avenir est incertain. Joint par téléphone mercredi, il a déclaré que deux autres de ses hommes avaient été blessés sur la ligne de front. Yevhen Semekhin a contribué à ce rapport. Source Traduction Maintenant que le monde dans son ensemble, en tout cas les grandes puissances, se dirigent vers une technocratie, le problème du mensonge en politique, ainsi que le sens des mots vérité » et réalité », doivent être réévalués. Par Paul Grenier – Le 22 août 2021 – Source National Interest Pendant la période précédant l’invasion de l’Irak, en 2003, Washington proclamait au monde entier que l’Irak était en possession d’armes de destruction massive. Bien que l’administration Bush ne disposait d’aucune preuve réelle pour étayer cette affirmation, cela ne fut pas un obstacle à la poursuite du plan d’action souhaité. Les preuves nécessaires ont été inventées, et les preuves contradictoires ont été autoritairement reboutées. L’exemple suivant est instructif. José Bustani, le directeur fondateur de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques OIAC, s’efforçait à l’époque de faire accepter l’Irak comme membre de l’OIAC, car cela aurait permis des inspections approfondies, et Bustani s’attendait pleinement à ce que ces inspections confirment ce que ses propres experts en armes chimiques lui avaient déjà dit, à savoir que toutes les armes chimiques de l’Irak avaient déjà été détruites, dans les années 1990 après la guerre du Golfe. La réponse de l’administration Bush à Bustani a été rapide John Bolton, alors sous-secrétaire d’État, lui a donné vingt-quatre heures pour démissionner ou en subir les conséquences. Pour l’administration Bush, le renversement de l’Irak était une affaire bien trop importante pour que la vérité y fasse obstacle. Comparez cela à la ligne de conduite adoptée par John F. Kennedy lors de la crise des missiles cubains. La crise elle-même a été déclenchée lorsque des avions espions américains ont photographié des sites de missiles SS-4 soviétiques à capacité nucléaire en cours d’installation sur le sol cubain. Contrairement aux armes chimiques irakiennes, ces armes de destruction massive étaient réelles et non inventées. Malgré cette preuve factuelle, et même si cela allait à l’encontre des conseils insistants de ses militaires, Kennedy refusa d’entrer en guerre. Il refusa d’envahir Cuba, sauvant ainsi, selon toute vraisemblance, le monde de l’Armageddon. Mais il existe un point de comparaison encore plus instructif entre les deux cas Les efforts constants de Kennedy, dans le sillage de la crise des missiles de Cuba, pour tenter de comprendre l’Union soviétique. Le discours qu’il prononce en juin 1963 à l’American University témoigne des efforts du président pour comprendre à la fois les motivations et la réalité complexe de l’adversaire soviétique. En décrivant les deux camps comme également pris au piège d’un cycle vicieux et dangereux, la suspicion d’un côté entraînant la suspicion de l’autre », Kennedy montre un esprit influencé par l’Iliade d’Homère. Il a loué le peuple russe pour ses nombreuses réalisations dans les domaines de la science et de l’espace, sa croissance économique et industrielle, sa culture et ses actes de courage ». Il a reconnu les pertes massives de l’Union soviétique pendant la Seconde Guerre mondiale. Au lieu de déshumaniser l’adversaire de l’Amérique, il a fait le contraire ; il a souligné notre humanité commune Nous respirons tous le même air. Nous chérissons tous l’avenir de nos enfants. Et nous sommes tous mortels ». Le contraste entre le niveau de réflexion atteint par Kennedy lors de son discours à l’American University et les banalités et mensonges si régulièrement proférés par les présidents américains depuis lors ne pourrait guère être plus dramatique. Que s’est-il passé ? Comment la qualité de la pensée et du leadership américains a-t-elle pu décliner de manière aussi rapide ? Page Smith, dans son Histoire des États-Unis » en huit volumes, revient à plusieurs reprises sur la compétition, pendant la majeure partie de l’histoire américaine, entre ce qu’il appelle une conscience chrétienne classique et une conscience laïque démocratique. Presque dès le début, selon Smith, la seconde l’a toujours emporté sur la première. Bien que cette étude de l’historien se termine avec l’administration de Franklin D. Roosevelt, je dirais que c’est Kennedy qui a brièvement rouvert la possibilité d’une Amérique incorporant au moins certains éléments importants de la perspective chrétienne classique. Avec l’assassinat de Kennedy, cette possibilité s’est refermée. Au moment où George W. Bush et Dick Cheney sont devenus les occupants de la Maison Blanche, la conscience chrétienne classique, à part quelques fioritures rhétoriques peu convaincantes, n’était déjà plus qu’un lointain souvenir. La politique, la culture et la société américaines étaient devenues profondément technocratiques. La conscience séculière, présente dès le début, a subi une transformation ; ou, peut-être serait-il préférable de dire, s’est concrétisée en une technocratie implicite dans son idée même. Sous la technocratie, la raison, voire la rationalité, ne sont plus reconnues comme ayant une valeur intrinsèque. Elles n’obligent plus notre accord. Au contraire, elles sont désormais elles-mêmes soumises à notre volonté. La nature devient du mastic entre les mains de l’homme technologique il n’est même plus possible de parler d’ homme ». Les acteurs qui agissent au sein de la société technologique refusent une telle dénomination. Ce sont eux qui décideront désormais technologiquement de ce que nous sommes » et de qui nous sommes, jusqu’au cœur de notre existence biologique. Ce milieu culturel américain présente deux aspects, deux vecteurs de fonctionnement. D’une part, nous avons les révolutionnaires de gauche » et les adeptes des cours accélérés sur Karl Marx et Michel Foucault qui, en nombre surprenant, ont récemment fait irruption sur les campus universitaires américains. Et puis nous avons, d’autre part, le nombre étonnamment élevé d’entreprises mondiales et, en particulier, tous les grands géants des médias sociaux qui, en tant que groupe, ont embrassé cette révolution ». Ces derniers, en particulier, contribuent à discipliner le discours public afin qu’il reste conforme à la nouvelle idéologie. Le dernier livre de Rod Dreher, Live Not By Lies, constitue une introduction utile à ce nouveau monde woke. La méthodologie de Dreher repose sur une vaste comparaison entre les États-Unis et l’URSS/Russie. Au cours de ces comparaisons, Dreher tombe parfois lui-même dans le piège du raisonnement technologique, par inadvertance. Néanmoins, son analyse est révélatrice. Elle montre comment ces entreprises et ces soldats wokes expriment une seule et même civilisation » profondément technocratique. Dreher prend l’Union soviétique et ses satellites d’Europe de l’Est comme l’exemple paradigmatique d’un ordre politique fondé sur le mensonge. Mais quel genre de mensonges » a-t-il à l’esprit ? Tout d’abord, l’athéisme. Pour Dreher, la négation par le système soviétique de la vérité de la foi chrétienne, une négation rendue nécessaire par son credo marxiste-léniniste fondateur, le matérialisme dialectique, est majeur. Le point central, pour Dreher, est qu’un système fondé sur l’athéisme est lui-même, pour cette même raison, déjà fondé sur un mensonge. Il accorde aussi une attention considérable aux défis moraux auxquels sont confrontés les croyants qui vivent dans une société qui considère la foi comme dangereuse, ou en tout cas comme quelque chose qui appartient entièrement au passé. Dans une telle société, il est difficile, et parfois même dangereux, de vivre ouvertement sa foi. Dans les années 1920 et 1930, lorsque plusieurs milliers de prêtres et de croyants orthodoxes ont été raflés et ont péri dans le goulag de Josef Staline, le danger était mortel. Bien qu’après la Seconde Guerre mondiale et la mort de Staline en 1953, la situation en Russie ait progressivement connu d’importants changements qui ont considérablement facilité la vie des croyants, il n’en reste pas moins que, pendant la majeure partie de la période soviétique, l’expression ouverte de la foi religieuse pouvait au minimum briser votre carrière. Le deuxième exemple de vie par le mensonge » cité par Dreher concerne l’exigence de conformité idéologique du système soviétique. Le matérialisme dialectique était l’idéologie régnante, et l’appareil du parti communiste faisait savoir quelle interprétation de cette idéologie devait être considérée comme faisant autorité. Dans un tel système, écrit Dreher, le Parti lui-même devenait la seule source de vérité ». Les écoliers devaient dire ce que l’idéologie exigeait d’eux au lieu de refléter dans leurs papiers ce qu’ils pensaient honnêtement. S’appuyant sur ces deux thèmes, Dreher établit une série de parallèles entre ce qu’il appelle l’empire totalitaire soviétique et le totalitarisme mou » actuellement installé par les révolutionnaires woke. Ces derniers partagent avec les premiers bolcheviks ce que l’on pourrait appeler une faute sociologique. Ils divisent les gens en deux catégories, les oppresseurs et les opprimés. Pour les bolcheviks, les oppresseurs étaient la bourgeoisie propriétaire, et les opprimés étaient les pauvres sans propriété, les paysans et les ouvriers d’usine. Pour les révolutionnaires américains, les oppresseurs sont désormais les chrétiens blancs, masculins et hétérosexuels, tandis que les opprimés sont les minorités sexuelles et les personnes de couleur [et les femmes, NdSF]. Une telle pensée par catégories sociologiques entraîne un échec de la raison. Bien que Dreher n’utilise pas le terme, cela implique également l’adoption du moralisme. Dreher note comment, pour une génération nourrie par Marx et filtrée par Foucault, la raison objective n’existe pas. La rationalité n’est plus considérée comme également disponible entre tous. La raison ne fait plus autorité. Ce qui compte, c’est la position de pouvoir de chacun, et le pouvoir est considéré comme une fonction de la catégorie oppresseurs ou opprimés à laquelle quelqu’un appartient. La similitude avec les premiers bolcheviks est en effet très frappante. Du point de vue des praticiens actuels de la justice sociale et autres idéologies wokenistes, note Dreher, l’ennemi ne peut être raisonné. L’ennemi ne peut qu’être vaincu. Ceux qui résistent à l’imposition de nouvelles doctrines par les révolutionnaires sont, prétendument, en train de pratiquer la haine » ». D’autre part, alors que le conformisme idéologique soviétique s’appliquait du haut vers le bas, dans le cas américain, il est plus distribué. Évoquant des thèmes qui rappellent l’essai controversé du metteur en scène russe Konstantin Bogomolov, Le viol de l’Europe », Dreher écrit Le totalitarisme [occidental] d’aujourd’hui exige l’allégeance à un ensemble de croyances progressistes, dont beaucoup sont incompatibles avec la logique – et certainement avec le christianisme. La conformité est forcée moins par l’État que par les élites qui forment l’opinion publique, et par les entreprises privées qui, grâce à la technologie, contrôlent nos vies bien plus que nous ne voudrions l’admettre. Les géants des médias sociaux de la Silicon Valley intensifient encore la menace totalitaire. Citant Edward Snowden, Dreher note que l’État a désormais accès, à perpétuité, aux communications de chacun, et que si le gouvernement veut cibler quelqu’un, il n’y a plus aucune raison d’espérer que la loi soit un refuge. Le résultat est la propagation d’un capitalisme de surveillance dans des domaines auxquels les tyrans orwelliens du bloc communiste n’auraient pu que rêver », et l’émergence de ce qu’il appelle un totalitarisme doux. Il est significatif que Dreher cite à plusieurs reprises Hannah Arendt comme autorité en matière de totalitarisme. Il cite sa thèse bien connue selon laquelle le totalitarisme tend à prendre racine dans une société d’individus déracinés, solitaires et isolés. Ces individus atomisés sont des cibles faciles pour une idéologie qui offre un sens, la possibilité de faire partie d’une cause. Un autre thème arendtien clé est la réduction de la raison à un outil pour se donner de la consistance. Une idéologie, pour Arendt, est par définition un système fermé dépourvu d’ouverture au mystère qui est la marque de la raison classique. Selon Dreher, dans la mesure où les géants américains des médias grand public et sociaux encouragent la répétition constante de mèmes et de phraséologie empruntés à la théorie critique des races et à d’autres sources de jargon progressiste, ils encouragent précisément une pensée idéologique. Citant Arendt, Dreher note que ce qui convainc les masses, au point où elles deviennent sensibles au totalitarisme, …ce ne sont pas les faits, ni même les faits inventés, mais seulement la cohérence du système dont ils font vraisemblablement partie. » Aux États-Unis, écrit Dreher à un moment donné, il est difficile pour le commun des mortels de ne serait-ce qu’imaginer un monde où il faut constamment mentir pour simplement exister. À intervalles réguliers, il oppose l’URSS totalitaire » aux États-Unis libres et prospères ». Il entend par là, bien sûr, les États-Unis tels qu’ils étaient avant qu’ils ne soient attaqués par ce qu’il appelle les Social Justice Warriors sjws, les révolutionnaires woke susmentionnés. C’est ici, cependant, que Dreher lui-même glisse vers un certain style de pensée technocratique. Au lieu de comprendre d’abord l’ensemble du phénomène qui se présente à lui, il s’en sert pour marquer des points et mieux vendre son récit. Sa position de missionnaire l’emporte sur son souci de vérité. La façon dont Dreher traite le phénomène de la Russie et de l’URSS tout au long du XXe siècle manque de nuance et est parfois tout à fait réductrice. Pour Dreher, l’ensemble de l’expérience soviétique a été uniformément totalitaire » – comme s’il n’y avait pas de différences importantes entre 1937 et 1967. Pour Dreher, tout au long de son existence, on n’a trouvé dans l’empire soviétique que mensonges, souffrance et misère matérielle. Il est vrai que l’URSS, même après la mort de Staline en 1953, était, à bien des égards, grise elle connaissait des pénuries chroniques de produits de consommation, le service dans les magasins et les restaurants était grossier. Il y avait, surtout dans la première période, des persécutions religieuses. Les grandes œuvres de la philosophie religieuse russe de V. Solovyov, S. Frank, N. Berdyaev, P. Florensky, etc. ont disparu dans des archives secrètes. La Russie soviétique avait beaucoup de choses qui méritaient d’être condamnées dans des termes tels que ceux que l’on trouve en abondance dans le volume de Dreher. Du coup, le lecteur n’a guère de raison de se douter qu’un certain nombre de monastères et d’églises ont été autorisés à rouvrir dans l’Union soviétique de l’après-guerre, ou que des Russes ordinaires ont été baptisés, et que ceux qui n’étaient pas communistes et soucieux de leur carrière pouvaient assister aux services religieux. La majorité, bien sûr, ne souhaitait plus le faire. L’idéologie matérialiste de l’État et la propagande antireligieuse ayant eu un certain impact. S’il est indubitable que l’Union soviétique ne possédait pas plusieurs des véritables vertus de l’Amérique de la guerre froide, il est tout aussi vrai qu’elle ne possédait pas certains des véritables défauts de l’Amérique. L’URSS n’était pas un monde centré sur l’argent. Il était plus facile de nouer des amitiés durables, et pas seulement parce que l’on avait plus de temps à leur consacrer. Les gens pouvaient choisir de consacrer leur vie à des activités aussi inutiles – et pourtant la quintessence de l’humain – que l’étude de la poésie ou la pratique du piano. Les classiques de la littérature russe du XIXe siècle étaient encore enseignés, lus et vénérés. Et puis il y a le cinéma soviétique. Quelques exemples suffiront. La nuit du carnaval 1956 et L’ironie du sort 1976 d’Eldar Ryazanov sont des chefs-d’œuvre d’humanité et même de joie. Andrei Rublev d’Andrei Tarkovsky, sorti en 1971 bien qu’il ait été édité, était imprégné d’un sens tragique et d’une beauté spirituelle. Pendant une grande partie de la période soviétique, les émissions de radio, de télévision et de théâtre destinées aux enfants étaient remarquables par leur chaleur et leur bon goût. Le contraste binaire de Dreher incarne précisément une logique technocratique de simplification excessive. Le philosophe italien Augusto Del Noce a noté que, du point de vue de la civilisation technologique dirigée par l’Occident, la révolution marxiste en Russie était considérée globalement comme une chose positive, infiniment préférable à l’ordre tsariste antérieur, avec sa foi chrétienne embarrassante et son manque de démocratie. Le matérialisme marxiste permettrait à la Russie d’ évoluer » progressivement dans la direction nécessaire. En fin de compte, l’Occident, grâce à ses attraits supérieurs, surmontera le marxisme en s’appropriant les côtés négatifs du marxisme tout en abandonnant l’humanisme résiduel du marxisme. Déjà en 1969, Del Noce écrivait que la société technologique occidentale imitait la méthode marxiste dans le sens où elle rejetait ce que Marx avait rejeté – en premier lieu le christianisme et Platon. Par contre, la société technologique va à l’encontre du marxisme en instituant un individualisme absolu. Une telle inversion donne à la civilisation technologique la fausse apparence d’être une démocratie » et la continuité de l’esprit du libéralisme. » Live Not By Lies de Dreher présente le thème classique d’une guerre froide entre un Ouest essentiellement bon et libre et un Est essentiellement mauvais et pas libre. Cela rend d’autant plus choquant le fait qu’un des interlocuteurs hongrois de Dreher observe que les trente précédentes années de liberté » ont détruit plus de mémoire culturelle en Hongrie que toute autre époque précédente. Ce que ni le nazisme ni le communisme n’ont pu faire, le capitalisme libéral victorieux l’a fait », lui dit un professeur hongrois. L’idée libérale occidentale a abouti à un déracinement plus complet de la personne du passé et de ses traditions, y compris de la religion » que ce que l’ère communiste avait réussi à faire. De même, Timo Krizka, cinéaste slovaque et chroniqueur de la persécution des fidèles à l’époque communiste, a déclaré que la prospérité et la liberté occidentales – la liberté telle que l’Occident la définit – n’avaient pas grand-chose à voir avec les aspirations de ces chrétiens qu’il avait fini par admirer. Ils avaient trouvé un sens même à leurs souffrances et vivaient dans la joie malgré le peu qu’ils possédaient. Ce que Krizka a découvert, écrit Dreher, c’est que l’idée libérale séculaire de la liberté si populaire en Occident … est un leurre ». Il s’est avéré que le fait de se libérer de tout engagement contraignant envers Dieu, le mariage, la famille est un chemin vers l’enfer ». Cela renverse le thème narratif précédent de Dreher. Le mouvement qui s’éloigne du mensonge » et qui, comme on nous l’avait laissé entendre, avait un caractère spatial – un mouvement qui s’éloigne de l’Est de la longue main de Moscou », du communisme, de la Russie, etc. et qui se dirige vers l’Occident, idéalement vers les États-Unis, s’avère plutôt être de nature civilisationnelle. Bien sûr, Dreher nous dit que l’Occident lui-même évolue dans des directions analogues à l’ancien ordre communiste. C’est bien le cas. Mais nous voyons maintenant un point très différent émerger. Le cœur même de l’idéal de la civilisation libérale, un idéal, de plus, très ancien en Occident, s’avère, selon Dreher, être un mensonge. Dreher cite le travail du philosophe catholique Michael Hanby, l’un des critiques les plus perspicaces de la modernité libérale. Hanby décrit ce qui pourrait s’avérer être le fil conducteur reliant le détournement actuel de l’Occident révolutionnaire de la nature biologique, de toute forme traditionnelle, et son apparente adhésion à une nouvelle utopie » technologique aux qualités dystopiques évidentes. Les deux mouvements trouvent leur source ultime dans cette habitude de pensée qui a défini la modernité libérale pendant des siècles le mythe du progrès et la science conçue comme le moteur de ce progrès. Pour Hanby, la révolution sexuelle en constante évolution est au fond, la révolution technologique et sa guerre perpétuelle contre les limites naturelles appliquées extérieurement au corps et intérieurement à la compréhension de soi ». Le défi que la pensée technocratique pose à la notion de vérité et de mensonge est fondamental. La perspective technologique se développe à partir du positivisme implicitement ou explicitement adopté, sinon par toute la science » occidentale en tant que telle certainement pas par toute la physique ou la science cognitive occidentale, du moins par le scientisme qui est à la mode dans le monde occidental éduqué depuis au moins le début du XIXe siècle. Pour la science ainsi comprise, la connaissance ne peut avoir de valeur que dans la mesure où elle sert des fins pratiques. Mais si seul ce qui est du domaine de la réalité matérielle est reconnu comme réel, alors ce qui est privilégié par rapport à tout le reste est la transformation de la matière, une transformation orientée vers un contrôle toujours plus grand. Une autre conséquence est la négation de la métaphysique et l’affaiblissement de la tradition. Del Noce aide à clarifier pourquoi cela doit être le cas. Si la notion platonicienne de vérité qui n’est que métaphysique » ne fait plus autorité et si, par conséquent, la vérité ne peut plus être considérée comme étant au-dessus de nous, alors pourquoi devrions-nous la révérer, pourquoi la considérer comme quelque chose de sacré ? La société technologique rejette toute révérence de ce genre. Notez, cependant, ce qui se passe ensuite. Une vérité aussi banalisée devient rapidement ennuyeuse. D’où l’adoration de la nouveauté, d’où la destruction joyeuse de toute tradition, qui est en soi la seule tradition » encore honorée par l’homme technocratique. Certes, bien avant le début du XIXe siècle, la pensée occidentale Francis Bacon, Niccolo Machiavel, John Locke et leurs héritiers avait déjà rejeté la nature telle qu’elle était comprise par les traditions de la pensée aristotélicienne et platonicienne et les formes de christianisme de l’Orient et de l’Occident influencées par celles-ci. Dans cette conception antérieure, non technocratique, de la nature, toutes les choses créées ont une orientation significative vers leur forme idéale, ou telos. C’est leur nature. En l’absence d’une forme juste pour quoi que ce soit, en l’absence de nature, comme l’a également reconnu Martin Heidegger, tout ce qui reste est de la matière nue au sens d’une ressource » attendant d’être modelée par une volonté extérieure. L’ordre technocratique est profondément volontariste. Si ce que nous savons du monde n’est pas conditionné ou limité par ce que les choses sont, dans leur nature même, alors qu’est-ce qui nous empêche de remplacer ce qu’on appelait la nature par ce que nous fabriquons nous-mêmes ? Qu’est-ce qui nous dissuade de supposer que ce qui existe de plus fondamental » est ce que nous fabriquons nous-mêmes ? Du point de vue du mode de connaissance technologique, comme l’a souligné le philosophe canadien George Grant, les processus de connaissance » et de fabrication » commencent à se confondre. Sous la technocratie, l’état d’esprit technologique atteint son apogée désormais, le sens même de la vérité change, tout comme la notion de mensonge. La vérité est ce que nous fabriquons. Ce que l’on appelait autrefois un mensonge peut être considéré maintenant comme une simple étape de ce processus de fabrication. La connaissance technologique ne nous laisse plus que deux façons d’être dans le monde le contrôle ou le conflit. Il n’est plus possible de simplement laisser être » ce qui n’est pas entièrement sous notre contrôle. Tout comme la vérité ne suscite plus de révérence, les choses », quelles qu’elles soient – arbres, nations, rochers, visages humains – ne suscitent pas non plus de révérence. Comme le dit Grant, tout ce que nous pouvons devoir, au sens d’un devoir ou d’une obligation nécessaire envers un autre être, est toujours provisoire par rapport à ce que nous désirons créer ». En d’autres termes, ce qui est dû » à quelque chose est toujours d’abord soumis à notre propre volonté. La volonté technocratique est autonome et libre » spécifiquement dans le sens où elle n’est pas entravée par un ordre, un telos ou une obligation antérieurs. Le rationaliste de style kantien répondrait, bien sûr, que les lignes de démarcation, les principes limitatifs, sont, après tout, fixés ici par l’autonomie et la dignité a priori de chaque sujet, ou personne. Mais quelle est la source de cette dignité ? C’est que nous sommes des créatures capables de concevoir notre propre loi. Et pour cette loi ainsi comprise, faut-il autre chose que la cohérence ? Dans sa forme moderne et vulgarisée, la grandeur de la pensée d’Emmanuel Kant produit le prétendu ordre fondé sur des règles » sur lequel les États-Unis fondent la légitimité de leur vision de l’ordre international. Mais un tel ordre » se passe du droit, et ce dans plusieurs sens. Comme je l’ai soutenu ailleurs, un ordre fondé sur le droit exige précisément la permanence et la disponibilité de la vérité – au minimum une capacité à déterminer de manière fiable ce qui n’est pas vrai. C’est précisément cette capacité qui n’existe plus dans l’ordre technocratique. Si la réalité et la vérité peuvent être créées, fabriquées, alors le waterboarding peut servir de moyen suffisamment fiable de découverte juridique. Le waterboarding, en tant que moyen d’interroger les prisonniers américains, est devenu populaire bien avant toute apparition de la gauche woke » dans la vie américaine. Cela nous amène à une omission notable dans le récit de Dreher sur ce que signifie ne pas vivre de mensonges ». L’instrumentalisation de la raison est en effet une pratique répandue parmi ceux que Dreher appelle les Social Justice Warriors susmentionnés. L’utilisation, ou plutôt l’abus de la raison n’est cependant pas une invention originale des sjws. C’est depuis longtemps un trait caractéristique de la modernité libérale en tant que telle. En même temps, dans le développement historique actuel du technologisme volontariste, c’est l’État américain de sécurité nationale qui a affiné cette approche en faisant de cette instrumentalisation de la raison l’outil le plus vital de son arsenal. Le résultat a été ces manipulations de l’information » qui ont remplacé ce qu’on appelait autrefois les nouvelles ». En effet, ces manipulations de l’information ne sont plus le fait d’une seule agence, mais de l’ensemble du gouvernement et même de l’ensemble du bloc politique. Alors pourquoi blâmer Black Lives Matter ? Si la majesté de la loi » – représentée par l’État lui-même, même si l’État, sans le reconnaître, a corrompu le sens même de la loi – modèle pour le reste de la société d’une imposition volontariste de sa volonté, pourquoi être surpris lorsque les citoyens d’un tel gouvernement imitent de manière radicale ce que l’État lui-même a déjà béni ? Si la loi modèle le volontarisme comme la forme idéale aujourd’hui technologiquement comprise de la raison » moderne, pourquoi s’étonner que la raison » des citoyens soit également corrompue ? Il ne s’agit en aucun cas de prendre le parti des wokes. Leur défense moralisatrice de catégories toujours nouvelles d’opprimés s’auto-détruit de toute façon. D’une part, Dreher décrit avec précision leur cynisme révolutionnaire vis-à-vis de la vérité », leur rejet de la raison ». D’autre part, il se peut que les révolutionnaires aient parfois raison de voir clair dans les tromperies d’un pouvoir qui se cache derrière un ersatz de raison » – Foucault, après tout, n’avait pas entièrement tort. Le problème est le suivant même les biens réels que les sjws peuvent occasionnellement défendre deviennent finalement sans défense dès que leur propre logique est adoptée. Comme l’a dit Schindler La dignité humaine repose sur le fait que, lorsque l’ordre social s’effondre, face à l’oppression et à la force aveugle du pouvoir, on peut toujours se positionner par rapport à la vérité. Mais si le fondement ultime de la vérité est lui-même suspendu… alors il n’y a pas d’endroit où se tenir. Arendt, bien connue pour ses études sur le totalitarisme, est moins souvent considérée comme une personne préoccupée par la transformation des États-Unis en un tel système idéologique. Bien qu’elle n’ait peut-être pas utilisé le terme technocratie », Arendt était très préoccupée par une tendance au sein de la haute politique américaine qui abandonnait son souci de la réalité, et donc son engagement envers l’ordre factuel qui existe indépendamment de notre volonté. Dans son commentaire sur les Pentagon Papers, par exemple, Arendt note que les hauts fonctionnaires de l’exécutif substituaient régulièrement au monde factuel un monde qu’ils avaient simplement fabriqué, un monde basé sur les apparences. Arendt a fait allusion à des préoccupations similaires lorsqu’elle a écrit, dans son essai intitulé Vérité et politique », que …enfin, et c’est peut-être le plus troublant, si les mensonges politiques modernes sont si gros qu’ils nécessitent un réarrangement complet de toute la texture factuelle – la création d’une autre réalité, pour ainsi dire, dans laquelle ils s’inséreront sans couture, fissure ou cassure, exactement comme les faits s’insèrent dans leur propre contexte original – qu’est-ce qui empêche ces nouvelles histoires, images et non-faits de devenir un substitut adéquat à la réalité et à la factualité ? Y a-t-il des raisons suffisantes pour supposer que, déjà ici, Arendt pensait non seulement aux régimes infâmes des années 30 en Allemagne et en URSS, mais aussi aux États-Unis tels qu’ils évoluaient déjà à son époque ? Au moment où elle écrit cet essai, en 1967, deux mensonges majeurs se sont déjà institutionnalisés aux États-Unis, même si l’un s’avère plus réussi que l’autre. Le premier concerne la guerre du Vietnam. Les nombreux mensonges qui ont rendu cette guerre possible ont finalement été rendus publics lorsque Daniel Ellsberg a divulgué les Pentagon Papers » en 1971. Arendt a consacré une attention considérable à ce rapport et à l’obsession malsaine de l’exécutif pour la fabrication d’images . D’autre part, les mensonges entourant les assassinats des années 1960 n’avaient pas encore, à l’époque, été rendus entièrement publics, et ils ne le sont toujours pas. En ce qui concerne l’assassinat de John F. Kennedy, Arendt, dans sa dernière interview, en octobre 1973, remarquait Je pense que le véritable tournant dans toute cette affaire a été en effet l’assassinat du président. Peu importe comment vous l’expliquez et peu importe ce que vous savez ou ne savez pas à ce sujet, il est tout à fait clair que maintenant, vraiment pour la première fois dans une très longue période de l’histoire américaine, un crime direct a interféré avec le processus politique. Et cela a en quelque sorte changé le processus politique. Sa déclaration cela a en quelque sorte changé le processus politique » est remarquable. Elle fait référence à la naissance de l’utilisation systématique du mensonge » qui change la réalité dans la politique américaine, l’utilisation d’une technologie capable d’assurer la création réussie d’une nouvelle réalité qui peut, comme Arendt l’a dit, se substituer à la réalité et la factualité. » Dans cette même interview, à la question de savoir ce qui motive l’arrogance du pouvoir » de l’exécutif, elle répond C’est vraiment la volonté de dominer, pour l’amour du ciel. Et jusqu’à présent, cela n’a pas réussi, car je suis toujours assise avec vous à cette table et je parle assez librement … d’une certaine manière, je n’ai pas peur. » Dans le sillage de l’assassinat – je devrais dire les assassinats, car les décès de John F. Kennedy, Robert Kennedy et Martin Luther King faisaient bien sûr tous partie de la même série – l’atmosphère spirituelle et intellectuelle des États-Unis a subi un changement radical. L’humaniste de formation classique, pourtant déjà une rareté, a tout simplement disparu de la politique américaine. Le sexe, drogue et rock-and-roll », le mysticisme, Tolkien, bien que de manière très différente, ont également servi à détourner beaucoup d’autres personnes du contact avec la vraie politique. Ceux qui étaient encore attirés par la politique ne pouvaient être que de deux types. L’un était l’ idéaliste » à la Ronald Reagan qui embrassait une version fantaisiste de l’Amérique et du monde en général. L’autre était le réaliste autoproclamé, le technocrate. Arendt, dans ses réflexions sur les Pentagon Papers, a décrit ces technocrates et résolveurs de problèmes » comme des hommes intelligents qui, à un degré plutôt effrayant », sont au-dessus de tout sentimentalisme. Ils mentent systématiquement, non pas parce qu’ils manquent de toute intégrité, mais simplement parce que cela leur donne un cadre dans lequel ils peuvent travailler. » Le divorce total entre l’acte et sa signification profonde crée en effet le cadre idéal pour un travail sans fin. Ce même type psychologique en est venu progressivement à occuper tous les bureaux de tous les buildings des think tanks de Washington et de Crystal City. Ce sont eux qui, après la chute de l’Union soviétique, ont élaboré les plans visant à décimer une demi-douzaine de pays au Moyen-Orient et en Asie centrale, après l’avoir déjà fait en Asie de l’Est et en Amérique centrale des années 1960 aux années 1980. Ce sont eux qui ont parsemé leurs discours de bons mots tels que Tous les dix ans environ, les États-Unis doivent prendre un petit pays minable et le jeter contre le mur, juste pour montrer au monde que nous sommes sérieux ». Rien ne fournit une base plus vigoureuse pour l’action et le contrôle que la peur, et les technocrates se mettent donc volontiers à créer les menaces qui suscitent cette peur toujours si utile. On pourrait continuer ainsi. D’une manière générale, l’impact de ces assassinats a été le suivant il a contribué à l’émergence d’une culture américaine qui, si elle n’est pas littéralement terrifiée par la pensée, l’évite au moins autant qu’il est humainement possible. Il est plus sûr de s’en tenir au scénario pré-approuvé. Maintenant que le monde dans son ensemble, ou en tout cas les grandes puissances, adoptent la technocratie, le problème du mensonge en politique, ainsi que la signification de la vérité » et de la réalité », doivent être réévalués. Il ne suffit plus de critiquer le mensonge en termes moraux. Seule une critique philosophique et théologique peut avoir un espoir d’adéquation avec le défi que représente la technocratie, notre nouvelle anti civilisation mondiale. Une fois que le savoir technologique devient omniprésent, la réalité » ne peut plus agir comme une limite ou une discipline contre le mensonge. Entre l’assassinat de Kennedy et aujourd’hui, en ce milieu d’année 2021, il y a eu de nombreux cas de création technocratique de nouvelles réalités » englobantes accomplies par l’utilisation de ce que l’on appelait autrefois des mensonges ». Le Russiagate vient certainement à l’esprit. Tout comme l’opération Timber Sycamore en Syrie. Tout comme ce fameux suicide dans une prison de New York, en août 2019, d’une personne également apparemment liée aux milieux du renseignement [Epstein, NdT]. Nous n’avons ni le temps ni l’espace pour développer tous ces exemples ici, et de toute façon, il serait inutile de le faire, sauf, peut-être, dans une nouvelle itération du Samizdat. L’Empire romain a persisté pendant des siècles sans aucune dévotion notable à la vérité. C’est en tout cas l’avis de Simone Weil [la philosophe, NdSF]. La Rome antique a démontré l’efficacité de la combinaison du pouvoir absolu, d’une part, et du maintien d’une réputation de grandeur, d’autre part. Cette méthode de domination humaine reposait sur une abondante autopromotion complétée par un système de propagande omniprésent. Cette même propagande était d’autant plus convaincante qu’elle suscitait l’effroi par l’usage massif de la force déployée contre quiconque y résistait. Dans ses Réflexions sur les origines de l’hitlérisme, Weil a trouvé dans la Rome antique l’inspiration originelle de cette puissance qui, au moment même où elle écrivait, terrorisait la France et la majeure partie du reste du continent européen. La Rome antique était avant tout un système volontariste, même si ce n’était pas, du moins au sens de ce terme que nous avons exploré plus haut, un système technocratique. Certes, sa conception de la nature et de la science différait grandement de celle de la Grèce antique. Ce qui préoccupait Rome avant tout, selon Weil, c’était son prestige. Toutes ces cruautés [le traitement réservé par Rome à Carthage, entre autres massacres] constituaient le moyen d’élever son prestige. Le principe central de la politique romaine … était de maintenir son propre prestige dans toute la mesure du possible, et quel qu’en soit le prix. » Plus loin dans l’essai, elle ajoute que rien n’est plus essentiel à une politique fondée sur le prestige que la propagande. » Je me demande souvent si, si Simone Weil écrivait aujourd’hui, elle aurait vu dans les États-Unis le digne successeur de la Rome antique. Certains indices, parsemés dans ses écrits, laissent penser qu’elle aurait pu être encline à aller dans ce sens. Dans A Propos de la question coloniale », elle écrit Nous savons bien qu’il existe un grave danger d’américanisation de l’Europe après la guerre, et nous savons ce que nous perdrions si cela devait arriver. Ce que nous devrions perdre, c’est cette partie de nous-mêmes qui s’apparente à l’Orient. … il semble que l’Europe ait périodiquement besoin de contacts authentiques avec l’Est afin de rester spirituellement vivante… l’américanisation de l’Europe conduirait à l’américanisation du monde entier. Weil s’inquiète que la domination de l’Amérique après la guerre signifie que l’humanité dans son ensemble perdra son passé. » Ce que Weil craignait s’est presque déjà produit. Certes, que ce soit l’Amérique ou un autre pays qui agisse comme moteur de l’ordre technocratique n’a, en fin de compte, que peu d’importance. Tant qu’une grande puissance – les États-Unis, la Chine, la Russie, l’Allemagne, etc. – adopte la technocratie, cela déclenche un mécanisme de rétroaction qui rend presque impossible pour toute autre nation de faire un choix civilisé. Aujourd’hui, la Russie craint clairement que le rejet de l’approche technologique ne fasse d’elle une proie facile pour les prédateurs extérieurs, et son alliance croissante avec la Chine n’est guère propice à l’abandon de la technocratie. Et pourtant, de toutes les grandes puissances, seule la Russie a les moyens historiques de s’engager résolument dans une autre direction. Il fut un temps, qui semble s’être achevé au milieu de l’administration Trump, où les conseillers du Kremlin conseillaient d’embrasser la tradition russe, influencée par le christianisme byzantin, d’une rationalité fondée sur la métaphysique. Ils ont fait valoir qu’un tel traditionalisme constituerait un exemple attrayant, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Russie, et qu’il aurait l’avantage supplémentaire de relier la politique russe à quelque chose que de nombreux Russes ordinaires pourraient respecter et pour lequel ils éprouveraient de l’affection. Le problème de la conciliation de la politique – en particulier d’une politique qui embrasse la vérité – et de la nécessité pour un public de ressentir une affection authentique pour son pays et son passé, est apparu au grand jour dans de nombreux pays ; aux États-Unis, il est au cœur même d’une crise nationale. En attendant, le résultat de ces efforts des conseillers du Kremlin reste, au mieux, assez ambigu. Les politiciens sont des pragmatiques. Ce qui n’apporte pas de résultats est généralement rejeté, et les ouvertures vers le monde extérieur fondées sur la tradition » n’ont rien apporté à la Russie. Est-il possible de terminer sur une note d’espoir ? Je ne peux pas parler pour la Chine. D’ailleurs, je ne peux pas non plus parler pour l’Angleterre, l’Allemagne ou la France. Quoi qu’il en soit, ce que j’ai vu de la Russie d’aujourd’hui suffit à entretenir l’espoir que, si les États-Unis ou toute autre grande puissance amorçait de manière inattendue une rupture avec le projet technocratique, pour embrasser au contraire la tradition de la rationalité qui considère la vérité comme sacrée, il y a de bonnes chances, dès aujourd’hui, qu’elle soit accueillie par la réciprocité de la Russie et, le cas échéant, par le pardon. Nous devons, bien sûr, mettre de côté les notions romantiques sur les Russes. Certains sont matérialistes. Certains sont des technocrates. Certains sont des tricheurs. Comme tout autre peuple, les Russes ont beaucoup de défauts. Pourtant, il reste en Russie un contingent non négligeable de personnes qui n’ont pas encore oublié leur tradition millénaire et qui murmurent parfois, avec émotion, la phrase Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ». Ces personnes, que l’on appelle des chrétiens, ont encore au moins une base solide sur laquelle s’appuyer en Russie. Pouvons-nous en dire autant en Occident ? Paul R. Grenier est le président et fondateur de Centre Simone Weil pour la philosophie politique Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone

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